Rémunérations et partage de la valeur, enjeux climatiques, gouvernance sont au cœur des AG 2022, avec une montée du dialogue très nette sur les Say on Climate.
Say on Climate : le climat s’invite à toutes les assemblées
Trois sociétés du CAC 40 ont présenté des résolutions Say on Climate au vote consultatif des actionnaires, une pratique qui se développe largement. Autant que l’année dernière. Les entreprises vont aux devants de la demande de leurs actionnaires, particulièrement avec la loi Energie et Climat : les investisseurs doivent rendre des comptes à leurs clients, et les entreprises cotées doivent prouver leurs avancées sur ce critère. Les scores d’approbation sont très élevés (Engie : 96,75% ; TotalEnergies : 88,89% ; Carrefour : 87,37%).
Cela n’a pas empêché des ONG de venir contester les stratégies climatiques de certaines sociétés notamment celles finançant les énergies fossiles. Deux résolutions « Say On Climate » externe ont été déposés chez TotalEnergies, l’une a été retirée à la suite d’un dialogue et de nouveaux engagements pris par le groupe, l’autre a été refusée par la société jugeant que la résolution empiétait sur les compétences du conseil et n’était donc pas juridiquement acceptable. Devant ce refus, les co-déposants ont fait appel à l’AMF, qui s’est déclarée incompétente pour contraindre le groupe pétrolier à inscrire une résolution climat. En revanche, le régulateur se déclare favorable à un nouveau cadre juridique pour les résolutions climat…à suivre.
Rémunérations des dirigeants, peu de questionnement sauf pour Stellantis
La rémunération des dirigeants des entreprises du CAC 40, portée par des primes exceptionnelles, a atteint 8,7M€ en moyenne en 2021, du jamais vu, selon les chiffres compilés par l’entreprise spécialisée dans les sociétés cotées européennes Scalens. Comprenant une part fixe et une part variable, elle a été multipliée par deux sur un an, et par 60% par rapport à 2019.
A ce titre, le cas du premier dirigeant de Stellantis est symbolique. Nous avons posé des questions écrites à ce titre à la direction de Stellantis et relayé cette action par une campagne médiatique pour alerter les actionnaires. Lors de L’AG du 13 avril, nous avons voté contre le rapport de rémunération 2021 qui chiffrait la rémunération de M. Carlos Tavares pour 2021 à 19M€, le bonus s’élevant pour lui seul à 7,5M€, soit 3,8 fois la rémunération fixe. Tenant compte des attributions d’actions gratuites, le montant total de la rémunération du Directeur Général de Stellantis attribuée au titre de 2021 s’élevait à 66M€. Même si les résultats 2021 étaient élevés, cette rémunération est-elle justifiée socialement alors que le groupe va devoir probablement faire face à des restructurations massives et des suppressions d’emplois compte tenu de ses surcapacités de production et doublons à la suite de la fusion PSA/FCA pour de nombreux postes ?
Les actionnaires se sont prononcés à 52% contre la proposition de « Say on Pay » de M. Carlos Tavares. Ce vote étant seulement consultatif aux Pays-Bas (contrairement à la France où le vote des actionnaires sur ce point s’impose à la société depuis l’affaire d’un certain Carlos Ghosn en 2016), le Conseil a déclaré que les actionnaires connaitraient sa décision lors de la prochaine assemblée en 2023…
Le cas de Stellantis est cependant une exception. De nombreuses sociétés ont fait voter, lors de leurs assemblées, des politiques de rémunérations 2022 prévoyant des augmentations des parts fixes et celles-ci sont passées avec souvent plus de 80% des voix POUR, sans aucun questionnement… si ce n’est notre action vis-à-vis de Stellantis. Comment interpréter ces hausses ? Le CAC a gagné quasiment 30% en un an. Les actions – puisque les dirigeants sont aussi payés en actions – ont gonflé. Mais cela n’explique pas une telle hausse des rémunérations fixes.
Gouvernance : un levier fort pour mettre en œuvre les objectifs environnementaux et sociaux.
Nous ne le répèterons jamais assez : s’il n’y a pas de gouvernance équilibrée, notamment un conseil d’administration avec des personnalités capables de faire valoir des points de vue contradictoires, les autres sujets ne peuvent pas être traités. Un Conseil d’Administration est ELU par les actionnaires. Il ne peut donc valablement, quel qu’en soit le motif, refuser des résolutions présentées par les actionnaires et ayant le seuil de capital minimum requis. Refuser ces résolutions revient à dénier la responsabilité et les droits des actionnaires et expose le Conseil à voir ces derniers lui retirer leur confiance. Et c’est un pouvoir qu’ils ont lors du vote du renouvellement des administrateurs.
Dans la continuité de notre engagement pour une gouvernance équilibrée chez Danone, nous sommes de nouveau intervenus lors de l’assemblée générale en déposant cette fois-ci une résolution, avec plusieurs co-déposants, sur le rôle du président d’honneur et ses fonctions. Notre résolution a obtenu 59,33% de votes en faveur. Bien que n’ayant pas obtenu la majorité qualifiée de 66%, ce score reste une réussite. La société a entendu partiellement la volonté des actionnaires de mettre au clair le titre de Président d’Honneur et a modifié le Règlement Intérieur du Conseil d’administration pour y inclure des évolutions allant dans le sens demandé par la résolution.