Pour de nombreuses ONG ou parties prenantes l’urgence climatique n’est pas au cœur de la stratégie des entreprises et il agissent bruyamment, parfois avec violence pour faire valoir leur point de vue.
Pour les investisseurs institutionnels ou les gérants d’actifs européens, la régulation les amène progressivement à exclure de leur portefeuille les sociétés les plus “polluantes” n’ayant pas d’objectif de réduction de leur “scope 3” en 2030 ou de neutralité carbone en 2050 en lien avec l’Accord de Paris de 2015.
Les entreprises ont pour la plupart d’entre elles bien compris la nécessité d’intégrer dans leur stratégie une réduction de leur “empreinte” et elles ont fait d’énormes progrès de présentation et de transparence notamment dans le secteur pétrolier ou bancaire.
Mais la réalité de ces mêmes entreprises les met en décalage par rapport à l’attente de leurs actionnaires ou parties prenantes que ce soit par manque de transparence (Carrefour) ou par refus de sortir de leur activité de base pendant cette période de transition (TotalEnergies).
Dans les deux cas, les investisseurs ont agi auprès de ces entreprises pour qu’elles répondent à leur attente.
Phitrust a déposé un point à l’ordre du jour de Carrefour pour que la société précise ses émissions Scope 3 et des investisseurs ont déposé une résolution dans le même sens, ce qui a amené la société à répondre très concrètement en Assemblée Générale avec des objectifs ambitieux.
Phitrust a posé une question à l’AG de TotalEnergies sur l’ambition du groupe en 2050 (rester un acteur fossile ou devenir majoritairement renouvelable ?). A la résolution d’autres actionnaires qui demandaient leurs objectifs scope 3 en 2030, TotalEnergies a répondu que ces émissions ne dépendaient pas d’eux et que même si l’objectif était de participer à la nécessaire décarbonation de l’économie, ils ne pouvaient décider à la place de leurs clients et devaient leurs vendre ce qu’ils voulaient acheter.
Deux façons très différentes de répondre à leurs actionnaires et parties prenantes. Cela pourrait malheureusement amener de nombreux investisseurs européens à vendre leurs actions TotalEnergies, Patrick Pouyanné ayant rappelé en Assemblée Générale que les actionnaires anglo-saxons étaient passés de 37 à 46 pct du capital de la société.
Alors que l’Europe se préoccupe de son indépendance énergétique depuis la guerre en Ukraine, les demandes des régulateurs européens et les réponses de TotalEnergies à ses parties prenantes nous interpellent et appellent à ce que nous prenions conscience collectivement des risques importants si nous sommes trop dogmatiques ou si nous ne voulons pas écouter ses parties prenantes… Le dialogue de sourd n’est de toute façon pas une solution.
Olivier De Guerre