Cette résolution a ouvert un débat au sein des gestions, entre les gérants ayant une vision plus financière qui se félicitent de la redistribution aux actionnaires de TotalEnergies et ceux ayant un axe plus ISR, qui insistent sur la nécessité pour le groupe d’accélérer sa transition

Phitrust souhaitait demander la suppression de la faculté d’annulation des actions dans le cadre des programmes de rachats d’actions. «Cela fait deux ans que TotalEnergies rend plus aux actionnaires qu’il n’investit dans la décarbonation. Une vraie question pour un groupe dont la transition climatique est majeure, déclare Denis Branche, co-fondateur et vice-président de Phitrust. Il faut être cohérent. Les rachats d’actions ont seulement un effet relutif sur le cours de Bourse. C’est un aveu de faiblesse du conseil, signifiant en creux qu’il n’a pas mieux à faire que renvoyer du cash aux actionnaires

En 2023, le pétrolier a investi près de 17 milliards de dollars, dont 35%, soit 5,9 milliards, dans les énergies bas-carbone, essentiellement dans l’électricité. Et, selon le document d’enregistrement universel de TotalEnergies, le groupe a dépensé 9 milliards de dollars en 2023 pour racheter plus de 142 millions d’actions, soit 5,91% de son capital, en vue de les annuler. En 2022, il avait consacré 7 milliards de dollars pour 5,35% du capital. Une accélération par rapport au 1,5 milliard de dollars déboursé pour 1,41% du capital en 2021. Sur les deux premiers mois de 2024, TotalEnergies avait déjà dépensé 1,3 milliard de dollars pour près de 21 millions d’actions, qui seront annulées.

TotalEnergies «doit conserver sa capacité à financer sa transition énergétique, poursuit Denis Branche. Or, ses résultats sont très sensibles au cours du pétrole, actuellement à un niveau élevé. Le groupe doit conserver une trésorerie substantielle pour financer la recherche, acquérir de nouvelles technologies, etc

En attendant, l’urgence pour Phitrust était de convaincre d’autres actionnaires pour réunir 0,5% du capital, soit 805 millions d’euros au cours actuel, avant la date butoir du 18 avril pour le dépôt de la résolution. Un défi. Les investisseurs responsables peuvent être moins engagés pour soutenir une résolution qui pèsera sur la valorisation de leur ligne….https://www.agefi.fr/news/entreprises/phitrust-va-demander-a-totalenergies-darreter-les-rachats-annulations-dactions

Finalement, Phitrust n’a pas eu le temps de convaincre 0,5% du capital. 0,2% du capital ont été réunis auprès de Messieurs Hottinguer, Groupama AM, Delubac, Federal Finance Arkea, Ossiam ainsi que quelques investisseurs privés

«Avec seulement une quinzaine de jours pour convaincre des investisseurs, nous avons manqué de temps et avons seulement pu réunir 0,2% du capital après avoir contacté directement 63 investisseurs, Denis Branche. Toutefois, cette résolution a ouvert un débat au sein des gestions, entre les gérants ayant une vision plus financière qui se félicitent de la redistribution aux actionnaires de TotalEnergies et ceux ayant un axe plus ISR, qui insistent sur la nécessité pour le groupe d’accélérer sa transition.» De son côté, TotalEnergies se félicite de la qualité du dialogue noué depuis longtemps avec Phitrust.

Engager les entreprises du CAC40 implique un dialogue exigeant et de long terme. Phitrust a déjà déposé 6 résolutions en AG de TotalEnergies et continuera d’inciter l’entreprise dans la transition de son modèle d’affaires.

Au-delà du changement climatique, la préservation et la conservation de la biodiversité constituent des enjeux structurels de croissance durable sur lesquels il est urgent d’agir

Phitrust, société de gestion pionnière de l’investissement à impact et Mirova, filiale de Natixis Investment Managers dédiée à la finance responsable, lancent une campagne de questions écrites en amont des assemblées générales, ciblée sur les entreprises du CAC40 à fort enjeu pour la biodiversité.

Cette action inédite vise à encourager les grandes entreprises à démontrer l’ambition de leur stratégie en faveur de la biodiversité, avec un double objectif :

  • Les inciter à utiliser le cadre de reporting sur la nature porté par la Taskforce on Nature-related Financial Disclosures (TNFD), et a minima leur demander qu’elles rendent compte de la biodiversité comme un sujet matériel pour leurs activités dans le cadre de la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD)[1] ;
  • Encourager ces entreprises à concrétiser leur ambition de préserver les écosystèmes naturels à travers des objectifs basés sur la science (exemple : Science-Based Targets for Nature, ou SBTN) à moyen terme.

Au-delà du changement climatique, la préservation et la conservation de la biodiversité constituent des enjeux structurels de croissance durable sur lesquels il est urgent d’agir. La moitié du PIB mondial est dépendante de la nature et de ses services écosystémiques essentiels, et leur effondrement pourrait induire une perte de PIB de 2,7 trillions de dollars à 2030[2]. Selon la Banque Centrale Européenne, 75 % des prêts européens ont été accordés à des entreprises fortement dépendantes de la nature[3].

Afin de guider les entreprises dans la prise en compte du sujet, un cadre international de recommandations en matière de divulgation sur la nature a été publié par la TNFD en septembre 2023[4], une étape clé positionnant le risque « nature » au même niveau que le risque financier, opérationnel et climatique et permettant de réorienter les flux de capitaux vers les entreprises les plus réactives face à la perte de la biodiversité. Les recommandations de la TNFD se veulent compatibles avec les obligations réglementaires des entreprises européennes telles que le cadre European Sustainability Reporting Scheme (ESRS)[5] de la directive sur les divulgations sur la durabilité (CSRD).

Plus de 320 entreprises dans le monde se sont déjà engagées à publier un rapport aligné sur les recommandations de la TNFD dans les deux prochaines années, et plusieurs entreprises prévoient déjà la validation de leurs d’objectifs alignés SBTN sur les terres et l’eau en 2024. Mirova et Phitrust agissent pour promouvoir ces référentiels auprès des entreprises, et notamment celles à fort enjeu pour la biodiversité.

Louise Schreiber, Responsable de la recherche en développement durable – Actifs Listés chez Mirova, déclare : « Avec cette première campagne, nous attendons de la part des entreprises des réponses claires et circonstanciées à nos questions. Le sujet de la biodiversité doit émerger dans la communication des entreprises au même titre que la rémunération des dirigeants ou les questions sur le climat. Nous espérons avec cette initiative que le sujet soit mis systématiquement à l’ordre du jour des prochaines Assemblées Générales et inscrit dans les communications des sociétés. »

À propos de PHITRUST

Depuis sa création en 1999, la société de gestion Phitrust investit pour agir auprès des grandes entreprises cotées pour qu’elles fassent évoluer leurs pratiques Environnementales, Sociales et de Gouvernance (ESG) – et auprès des entreprises sociales innovantes pour leur donner les moyens financiers et humains de changer d’échelle et déployer leur impact social et environnemental. Deux activités, une seule mission traduite dans la raison d’être de la société : Investir pour agir et contribuer à faire grandir les entreprises qui intègrent au cœur de leur stratégie le développement de l’être humain et la préservation de notre planète.

Les décisions des grandes entreprises sur la répartition de la richesse créée et sur l’allocation du capital dans l’économie ont un impact économique, social et environnemental qui dépasse leur périmètre. Elles sont devenues des acteurs incontournables dans la recherche de solutions aux grands défis sociétaux. Phitrust exerce pleinement auprès d’elles son rôle d’actionnaire engagé, constructif et exigeant, en mobilisant les investisseurs institutionnels, dans un seul objectif : alerter sur les risques et les accompagner dans le changement de leurs modèles d’affaires. Avec 20 ans d’expérience et de relations directes avec les dirigeants des grandes entreprises, Phitrust a déposé 50 résolutions en assemblées générales des sociétés du CAC40.

www.phitrust.com

À propos de Mirova

Mirova est une société de gestion globale d’actifs dédiée à l’investissement durable et une filiale de Natixis Investment Managers. À la pointe de la finance durable depuis plus d’une décennie, Mirova développe des solutions d’investissement innovantes dans toutes les classes d’actifs, visant à combiner création de valeur à long terme avec un impact environnemental et social positif. Basée à Paris, Mirova propose une large gamme de stratégies actions, taux, diversifié, infrastructures de transition énergétique, capital naturel et private equity conçues pour les investisseurs institutionnels, les plateformes de distribution et les investisseurs particuliers en Europe, Amérique du Nord et Asie-Pacifique. Mirova et ses sociétés affiliées comptaient 29,7 milliards d’euros d’actifs sous gestion. Mirova est une entreprise à mission, labellisée B Corp*.

*La référence à un label ne préjuge pas de la performance future des fonds ou de ses gérants

Société de gestion de portefeuille – Société Anonyme
RCS Paris n°394 648 216 – Agrément AMF n°#GP 02-014
59, avenue Pierre Mendès-France – 75013 Paris

Mirova est un affilié de Natixis Investment Managers.
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À propos de Natixis Investment Managers

L’approche multi-boutique de Natixis Investment Managers permet aux clients de bénéficier de la réflexion et de l’expertise ciblée de plus de 15 gérants actifs. Classé parmi les plus grands gestionnaires d’actifs1 au monde avec plus de 1 166 milliards d’euros d’actifs sous gestion2, Natixis Investment Managers propose une gamme de solutions diversifiées couvrant différents types de classes d’actifs, de styles de gestion et de véhicules, y compris des stratégies et des produits innovants en matière d’environnement, de social et de gouvernance (ESG) dédiés au développement de la finance durable. Nous travaillons en partenariat avec nos clients afin de comprendre leurs besoins personnels et de leur fournir des informations et des solutions d’investissement adaptées à leurs objectifs à long terme.

Basée à Paris et à Boston, Natixis Investment Managers fait partie du pôle Global Financial Services du Groupe BPCE, deuxième groupe bancaire en France à travers les réseaux Banque Populaire et Caisse d’Epargne. Toutes les offres ne sont pas disponibles dans toutes les juridictions. Pour plus d’informations, veuillez consulter le site Internet de Natixis Investment Managers à l’adresse im.natixis.com | LinkedIn: linkedin.com/company/natixis-investment-managers.

Les groupes de distribution et de services de Natixis Investment Managers comprennent Natixis Distribution, LLC, une société de courtage à vocation limitée et le distributeur de diverses sociétés d’investissement enregistrées aux États-Unis pour lesquelles des services de conseil sont fournis par des sociétés affiliées de Natixis Investment Managers, Natixis Investment Managers S.A. (Luxembourg), Natixis Investment Managers International (France), et leurs entités de distribution et de services affiliées en Europe et en Asie.

1 Cerulli Quantitative Update : Global Markets 2023 a classé Natixis Investment Managers comme le 17éme plus grand gestionnaire d’actifs au monde sur la base des actifs sous gestion au 31 décembre 2022.
2 Les actifs sous gestion (« AUM ») au 31 décembre 2023 des actuelles entités affiliées sont de 1 288,6 milliards de dollars (soit 1 166,5 milliards d’euros). Les actifs sous gestion, tels que déclarés, peuvent inclure des actifs notionnels, des actifs gérés, des actifs bruts, des actifs d’entités affiliées détenues par des minorités et d’autres types d’actifs sous gestion non réglementaires gérés ou gérés par des sociétés affiliées à Natixis Investment Managers.
3 Une marque de DNCA Finance.

NATIXIS INVESTMENT MANAGERS
Société anonyme de droit français
RCS Paris n°453 952 681
Siège social : 59, avenue Pierre Mendès-France – 75013 Paris
Natixis Investment Managers est une filiale de Natixis.


[1] Directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) no 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises

[2] The Economic Case for Nature A Global Earth-economy model to assess development policy pathways, Banque Mondiale, 2021

[3] The economy and banks need nature to survive, Banque Centrale Européenne, 2023

[4] Final TNFD Recommendations on nature related issues published and corporates and financial institutions begin adopting, TNFD, 2023

[5] Règlement délégué (UE) 2023/2772 de la Commission du 31 juillet 2023 complétant la directive 2013/34/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les normes d’information en matière de durabilité

Rester actionnaire et utiliser son pouvoir d’actionnaire pour inciter celles qui ont commencé leur transition à aller plus vite, reste le meilleur levier d’action.

Les actionnaires se présentant à l’AG 2023 de TotalEnergies salle Pleyel ont dû franchir avec difficulté un barrage de manifestants venus empêcher la tenue physique de ce rendez-vous annuel. Ils se sont fait traiter de «criminels» car ils étaient actionnaires, les représentants des ONG présents sur place les appelant à vendre leurs actions pour ne pas cautionner la politique climatique jugée défaillante du pétrolier français.

Exclure ou ne pas exclure ? Un choix, dans la pratique, toujours au cœur des problématiques des investisseurs responsables, même si les défenseurs de la finance durable – des grands investisseurs aux régulateurs européens, semblent avoir adoubé le principe de l’exclusion des secteurs les plus polluants. A minima, dans la théorie et dans leur communication auprès du grand public. Faut-il vendre tous les titres d’entreprises présentes dans l’énergie fossile, mais aussi ceux des banques qui financent leurs projets d’extraction, ainsi que des groupes d’assurance qui couvrent leurs risques, voire les sociétés de conseil qui les ont pour clientes comme Publicis cette année ? Pour avoir l’air irréprochable peut-être, pour contribuer efficacement à la transition des entreprises vers une économie décarbonée, c’est moins clair.

Les risques de l’exclusion : si on parlait de responsabilité …Nous pensons que les investisseurs français ont une responsabilité politique à rester actionnaires pour ne pas laisser des investisseurs non européens contrôler des groupes dont les activités sont éminemment stratégiques pour le pays, d’un point de vue économique, énergétique et social. M. Pouyanné rappelait en AG de TotalEnergies que les actionnaires anglo-saxons étaient passés de 37 à 46% du capital. Rester actionnaire empêche aussi ces acteurs clés de l’énergie, de la construction ou des matières premières, y compris des métaux rares qui sont pourtant ressources incontournables du renouvelable, de sortir de la cote et devenir ainsi plus opaques. Alors que l’Europe se préoccupe de son indépendance énergétique et industrielle, les demandes des régulateurs européens et les réponses des grandes entreprises françaises directement concernées nous interpellent et appellent à ce que nous prenions conscience collectivement des risques importants à trop de dogmatisme.

Nuancer les positions, un choix possible? Exclure les entreprises qui tirent encore 100% de leur chiffre d’affaires des énergies fossiles, certes, mais rester actionnaire et utiliser son pouvoir d’actionnaire pour inciter celles qui ont commencé leur transition à aller plus vite, reste le meilleur levier d’action. Car rester actionnaire permet de faire entendre sa voix et conserver sa capacité d’influence. L’engagement actionnarial est la solution que Phitrust a retenue pour appliquer de la façon la plus pertinente et efficace à long terme le principe d’investissement responsable de «Do no harm», surtout quand il n’existe pas à court terme de solutions de remplacement bas carbone simples et non coûteuses en matière sociale. Plutôt que d’exclure de ses portefeuilles les entreprises encore impliquées dans des activités polluantes, Phitrust reste actionnaire dans la durée, ce qui lui permet de questionner les dirigeants des entreprises année après année et les challenger, en fédérant d’autres investisseurs, dans leur transition vers une économie bas carbone.

 Merci à tous nos actionnaires actuels et futurs qui nous rejoindront, pour promouvoir ensemble cet engagement. Bonne lecture !

Pourquoi exclure les magasins en franchise du périmètre de réduction des émissions Scope 3 du groupe, alors que le passage en franchise est un élément central de la stratégie actuelle ?

Phitrust fédère des actionnaires de Carrefour pour faire inscrire un point à l’ordre du jour sur sa stratégie climat lors de sa prochaine assemblée générale.

Les informations présentées par Carrefour nous ont conduits à nous interroger sur la stratégie climatique du groupe notamment sur ses objectifs du « Scope 3 », les chiffres publiés n’intégrant pas les émissions des magasins franchisés (90% des magasins en France et 76% en Europe).

PHITRUST avec 10 autres actionnaires professionnels *, représentant ensemble 1,1% du capital de CARREFOUR, a fait inscrire un point à l’ordre du jour de l’Assemblée Générale du 26 mai prochain.
Cette initiative fait suite à des échanges avec la société qui n’ont pas permis de répondre à nos questions. Son objectif est de demander au conseil d’administration d’expliquer aux actionnaires ses choix en matière de stratégie climatique et de clarifier le reporting des émissions de gaz à effet de serre du groupe, avec deux questions :
1/ pourquoi ne pas publier les données des émissions indirectes Scope 3 dans le document d’enregistrement universel destiné aux actionnaires alors que celles-ci sont présentées dans le questionnaire du Carbon Disclosure Project (CDP) ?
2/ pourquoi exclure les magasins en franchise du périmètre de réduction des émissions Scope 3 du groupe, alors que le passage en franchise est un élément central de la stratégie actuelle ? Ce point à l’ordre du jour doit donner lieu à une réponse formelle du conseil d’administration de CARREFOUR et à un débat au cours de l’assemblée générale.

Nous espérons permettre ainsi une meilleure compréhension de la stratégie climatique, du périmètre concerné et de l’empreinte environnementale globale du groupe CARREFOUR.

  • EDRAM pour l’ERAFP, LA BANQUE POSTALE AM, SYCOMORE AM, MN (Pays-Bas), OFI Invest AM, GROUPAMA AM, IRCANTEC, CAVP, PROMEPAR, ECOFI-Gestion.
Depuis 2017, nous avons choisi les SBT pour questionner chaque année les sociétés du CAC40 sur leur adhésion. L’objectif : obtenir que 100% des sociétés aient pour objectif un alignement avec une trajectoire de réchauffement + 1,5°C. 

L’initiative Science Based Targets (SBTi) est un projet conjoint du Carbon Disclosure Project (CDP), du Global Compact des Nations Unies, du World Resources Institute (WRI) et du World Wide Fund (WWF). L’initiative vise à encourager les entreprises à définir des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) en cohérence avec les préconisations scientifiques. 

Depuis 2017, nous avons choisi les SBT pour questionner chaque année les sociétés du CAC40 sur leur adhésion. L’objectif : obtenir que 100% des sociétés aient pour objectif un alignement avec une trajectoire de réchauffement + 1,5°C. 

En France à ce jour, 26 sociétés du CAC40 ont adhéré de cette initiative (contre 6 en 2018) et sont qualifiées « Targets Set » (objectifs validés par les SBTi et engagement de réduire leurs émissions – scopes 1 à 3 – avec des données quantifiables). Neuf autres sociétés s’engagent à faire valider leurs objectifs par les SBTi (« committed »). Pour certains secteurs, une méthodologie est encore en cours de développement par l’initiative SBT. Ceci explique le fait que certaines entreprises soient encore au stade « Committed », notamment celles du secteur financier, ou que d’autres n’aient pas encore adhéré à l’initiative (TotalEnergies, EssilorLuxottica, etc…).

Rémunérations et partage de la valeur, enjeux climatiques, gouvernance sont au cœur des AG 2022, avec une montée du dialogue très nette sur les Say on Climate.

Say on Climate : le climat s’invite à toutes les assemblées

Trois sociétés du CAC 40 ont présenté des résolutions Say on Climate au vote consultatif des actionnaires, une pratique qui se développe largement. Autant que l’année dernière. Les entreprises vont aux devants de la demande de leurs actionnaires, particulièrement avec la loi Energie et Climat : les investisseurs doivent rendre des comptes à leurs clients, et les entreprises cotées doivent prouver leurs avancées sur ce critère. Les scores d’approbation sont très élevés (Engie : 96,75% ; TotalEnergies : 88,89% ; Carrefour : 87,37%).

Cela n’a pas empêché des ONG de venir contester les stratégies climatiques de certaines sociétés notamment celles finançant les énergies fossiles. Deux résolutions « Say On Climate » externe ont été déposés chez TotalEnergies, l’une a été retirée à la suite d’un dialogue et de nouveaux engagements pris par le groupe, l’autre a été refusée par la société jugeant que la résolution empiétait sur les compétences du conseil et n’était donc pas juridiquement acceptable. Devant ce refus, les co-déposants ont fait appel à l’AMF, qui s’est déclarée incompétente pour contraindre le groupe pétrolier à inscrire une résolution climat. En revanche, le régulateur se déclare favorable à un nouveau cadre juridique pour les résolutions climat…à suivre.

Rémunérations des dirigeants, peu de questionnement sauf pour Stellantis 

La rémunération des dirigeants des entreprises du CAC 40, portée par des primes exceptionnelles, a atteint 8,7M€ en moyenne en 2021, du jamais vu, selon les chiffres compilés par l’entreprise spécialisée dans les sociétés cotées européennes Scalens. Comprenant une part fixe et une part variable, elle a été multipliée par deux sur un an, et par 60% par rapport à 2019.

A ce titre, le cas du premier dirigeant de Stellantis est symbolique. Nous avons posé des questions écrites à ce titre à la direction de Stellantis et relayé cette action par une campagne médiatique pour alerter les actionnaires. Lors de L’AG du 13 avril, nous avons voté contre le rapport de rémunération 2021 qui chiffrait la rémunération de M. Carlos Tavares pour 2021 à 19M€, le bonus s’élevant pour lui seul à 7,5M€, soit 3,8 fois la rémunération fixe. Tenant compte des attributions d’actions gratuites, le montant total de la rémunération du Directeur Général de Stellantis attribuée au titre de 2021 s’élevait à 66M€. Même si les résultats 2021 étaient élevés, cette rémunération est-elle justifiée socialement alors que le groupe va devoir probablement faire face à des restructurations massives et des suppressions d’emplois compte tenu de ses surcapacités de production et doublons à la suite de la fusion PSA/FCA pour de nombreux postes ? 

Les actionnaires se sont prononcés à 52% contre la proposition de « Say on Pay » de M. Carlos Tavares. Ce vote étant seulement consultatif aux Pays-Bas (contrairement à la France où le vote des actionnaires sur ce point s’impose à la société depuis l’affaire d’un certain Carlos Ghosn en 2016), le Conseil a déclaré que les actionnaires connaitraient sa décision lors de la prochaine assemblée en 2023…

Le cas de Stellantis est cependant une exception. De nombreuses sociétés ont fait voter, lors de leurs assemblées, des politiques de rémunérations 2022 prévoyant des augmentations des parts fixes et celles-ci sont passées avec souvent plus de 80% des voix POUR, sans aucun questionnement… si ce n’est notre action vis-à-vis de Stellantis. Comment interpréter ces hausses ? Le CAC a gagné quasiment 30% en un an. Les actions – puisque les dirigeants sont aussi payés en actions – ont gonflé. Mais cela n’explique pas une telle hausse des rémunérations fixes.

Gouvernance : un levier fort pour mettre en œuvre les objectifs environnementaux et sociaux. 

Nous ne le répèterons jamais assez : s’il n’y a pas de gouvernance équilibrée, notamment un conseil d’administration avec des personnalités capables de faire valoir des points de vue contradictoires, les autres sujets ne peuvent pas être traités. Un Conseil d’Administration est ELU par les actionnaires. Il ne peut donc valablement, quel qu’en soit le motif, refuser des résolutions présentées par les actionnaires et ayant le seuil de capital minimum requis. Refuser ces résolutions revient à dénier la responsabilité et les droits des actionnaires et expose le Conseil à voir ces derniers lui retirer leur confiance. Et c’est un pouvoir qu’ils ont lors du vote du renouvellement des administrateurs. 

Dans la continuité de notre engagement pour une gouvernance équilibrée chez Danone, nous sommes de nouveau intervenus lors de l’assemblée générale en déposant cette fois-ci une résolution, avec plusieurs co-déposants, sur le rôle du président d’honneur et ses fonctions. Notre résolution a obtenu 59,33% de votes en faveur. Bien que n’ayant pas obtenu la majorité qualifiée de 66%, ce score reste une réussite. La société a entendu partiellement la volonté des actionnaires de mettre au clair le titre de Président d’Honneur et a modifié le Règlement Intérieur du Conseil d’administration pour y inclure des évolutions allant dans le sens demandé par la résolution.

La question de la juste répartition de la valeur créée, non seulement entre tous les actionnaires mais aussi entre toutes les parties prenantes, y compris les dirigeants et les salariés, est un enjeu fondamental pour un bon équilibre et le succès de toute entreprise.

Régulièrement la publication de rémunérations très élevées de dirigeants avec des mécanismes de calcul complexes interpellent les actionnaires, les salariés et la presse qui s’en fait l’écho. Autant la révélation d’une forte rétribution pour un entrepreneur qui a pris un risque personnel ne soulève quasiment jamais de questions, autant celle de dirigeants n’ayant pas pris de risque financier est mal comprise. Le cas de Carlos Tavares qui dirige Stellantis (avec un package de rémunération totale de plus de 60 M€) en est l’exemple le plus récent : la fusion n’est pas encore finalisée et les risques sociaux liés à cette fusion ne sont pas encore matérialisés. Sans parler du cas du dirigeant d’Universal Music Group ayant reçu une prime exceptionnelle de plus de 230 M€ liée à l’introduction en bourse du groupe et payée par Vivendi.

Résolutions déposées par Phitrust questionnant les rémunérations : Total, Sanofi, Cap Gemini, Renault, Stellantis,…

La complexité des rémunérations, associée à des changements de fiscalité successifs, a, en général, entraîné les dérives suivantes :

-Une rémunération fixe, quelquefois très élevée et le plus souvent alignée avec les « comparables » (des concurrents américains pour Stellantis même si son activité est principalement en Europe) ;

-Une rémunération variable annuelle attribuée sur la base de critères financiers et, de plus en plus souvent, extra-financiers. Elle est publique et rarement contestée dans le détail. Les contestations sont plutôt sur l’enveloppe globale et son multiple par rapport à la rémunération fixe ;

-Une rémunération variable long terme associée à l’évolution boursière de l’entreprise et attribuée aujourd’hui le plus souvent en France ou en Europe sous forme d’actions gratuites et ce, pour des raisons fiscales (même si la règlementation s’est durcie en 2021 en France) ;

-Une retraite dite « chapeau », équivalente à un complément de retraite par rapport aux systèmes existants, ce qui a permis à de nombreux dirigeants de percevoir des retraites de 1 à 2 M€ alors qu’ils partaient entre 60 et 65 ans… Bien peu, comme Emmanuel Faber de Danone, ont décidé de ne pas la percevoir. Certains, conscients de la dérive, sont allés jusqu’à modifier le système en partant, pour leur successeur mais en gardant la leur…

Quel que soit le schéma retenu, pour la plupart des entreprises le dirigeant n’est pas en risque financier personnel : il est salarié. De surcroit, on compare souvent les rémunérations des dirigeants en France à celles pratiquées par les entreprises américaines, sans préciser que le régime fiscal de leurs dirigeants, quel que soit l’endroit où ils résident, est le régime américain. A l’inverse, les dirigeants européens peuvent bénéficier de la très faible fiscalité des pays où ils décident de s’établir.

Pour remédier à l’incompréhension des salariés et de nombreux actionnaires, il nous semble que le système pourrait être réaménagé de la façon suivante :

-Une partie fixe laissée à la discrétion du Conseil d’administration, votée en AG,

-Une partie variable plafonnée à une ou deux fois la partie fixe, attribuée après le vote en AG,

-Une attribution d’actions gratuites à la même hauteur que l’investissement fait par le dirigeant en achetant des actions de la société, et ce afin qu’il prenne un risque personnel.

-Un plafonnement des retraites chapeaux afin de limiter le coût pour l’entreprise, considérant que les rémunérations du dirigeant lui permettent aussi d’épargner pour sa retraite.

La question de la juste répartition de la valeur créée, non seulement entre tous les actionnaires mais aussi entre toutes les parties prenantes, y compris les dirigeants et les salariés, est un enjeu fondamental pour un bon équilibre et le succès de toute entreprise.

Si elles constituent un progrès dans le traitement des enjeux environnementaux, ces résolutions pourraient suivre une normalisation comme cela a été le cas pour le « Say on pay ».

Ce type de résolution a été déposé pour la première fois en 2020 par The Child Investment Fund (TCI) auprès l’entreprise Aena ; le principe est de demander aux actionnaires de voter sur les plans d’actions pour la transition climatique des sociétés. Le vote de plusieurs résolutions dites Say-on-Climate est un véritable pas en avant dans la transition écologique des grandes entreprises.

En 2022, en France, dix entreprises, dont TotalEnergies, EDF, Engie, Amundi, Carrefour ont soumis à l’approbation de leurs actionnaires une résolution de cette sorte. Elles n’étaient que trois en 2021 et zéro en 2020. Il est important de noter qu’elles sont en partie le fruit d’un engagement actionnarial de long terme mené par des acteurs de la gestion soit individuellement soit regroupés au sein de coalitions comme Climate Action 100+.

La question de l’utilité de ces résolutions soulève des débats, certains investisseurs craignent que ce type de résolution ne soit utilisé pour promouvoir des stratégies pas assez ambitieuses qui une fois validées seront plus difficilement critiquables. De plus ces résolutions n’offrent pas toujours un niveau d’information permettant de se faire une opinion. Que soumettre au vote. La stratégie ? Les objectifs ? tous les ans ? Du coup, ces résolutions sont variables. Si elles constituent un progrès dans le traitement des enjeux environnementaux, ces résolutions pourraient suivre une normalisation comme cela a été le cas pour le « Say on pay ».

La transition environnementale et sociale du modèle d’affaires des entreprises passe par une gouvernance équilibrée, alignée et organisée.


Il est vraisemblable que les conseils d’administration et les administrateurs seront de plus en plus appelés en responsabilité pour répondre des conséquences de leurs décisions stratégiques.

Nous avons la conviction que seule une gouvernance équilibrée et expérimentée peut créer de la valeur à long terme. Et surtout qu’elle est la garante d’un traitement des enjeux sociaux et environnementaux à un niveau stratégique. 

Crise de gouvernance exemplaire, celle qu’a connue la société DANONE entre 2020 et 2021, avec le départ de son emblématique PDG Emmanuel Faber, a mis en lumière tant des dysfonctionnements de forme que des désaccords de fond existant au sein du Conseil d’administration. Phitrust est l’une des rares sociétés de gestion à avoir exprimé publiquement ses interrogations quant aux raisons de cette crise.

Le 8 avril 2021, nous demandons avec succès, avec quatre autres investisseurs, au Conseil d’administration de Danone l’inscription d’un point à l’ordre du jour de l’Assemblée générale du 29 avril 2021. L’objectif : demander à chaque administrateur de s’exprimer individuellement sur sa vision stratégique pour le groupe Danone en développant notamment son apport personnel sur les questions environnementales et son approche pour l’organisation d’une gouvernance équilibrée. Le groupe prend alors la décision de renouveler la quasi-totalité de son Conseil d’administration d’ici 2023. Néanmoins, un point non satisfaisant subsiste : le rôle du Président d’Honneur. Nous estimons que, après la crise de gouvernance traversée par Danone, il serait ambigu de laisser un ancien PDG, censé quitter ses fonctions d’administrateur, assister à toutes les réunions du Conseil.

Dans la continuité de cet engagement pour une gouvernance équilibrée, aux côtés de Mirova, Ircantec, CAVP (Caisse d’Assurance Vieillesse des Pharmaciens), OFI AM et l’ERAFP, nous faisons inscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée Générale Mixte du 26 avril 2022, un projet de résolution portant sur une modification statutaire concernant le rôle du Président d’Honneur, en inscrivant dans les statuts les conditions de sa présence au Conseil.

Notre résolution obtiendra 59,33% de votes en faveur. Bien que n’ayant pas atteint la majorité qualifiée de 66%, ce score reste une réussite. La société a entendu partiellement la volonté des actionnaires de mettre au clair le rôle de Président d’Honneur et a modifié le Règlement Intérieur du Conseil d’administration pour y inclure des évolutions allant dans le sens demandé par la résolution notamment concernant la confidentialité des débats du conseil. Nous poursuivrons notre dialogue avec le groupe et resterons vigilants quant à l’équilibre de sa gouvernance.

La résolution sur le rapport de rémunération des dirigeants a été rejetée à 52% lors de l’Assemblée Générale de Stellantis du 13 avril 2022. Notre campagne publique préalable aux questions écrites a convaincu une majorité des actionnaires.

La transition écologique ne peut se faire sans prendre en compte les enjeux sociaux. Parmi les quelques indicateurs disponibles figure le ratio d’équité, sur lequel nous questionnons chaque année les 40 entreprises du CAC. Cet indicateur inclut la prise en compte de la rémunération des premiers dirigeants, et son évolution.

En avril 2021, la première AG de Stellantis se tient à huis clos, avec de nombreuses interventions pré-enregistrées, sans la possibilité de voter en direct. Son siège social étant désormais au Pays-Bas , la rémunération fixe des dirigeants de la société n’est pas communiquée aux actionnaires ; aucun « Say on Pay » sur la rémunération de M.Carlos Tavares ne peut être voté la. Seul le rapport des rémunérations, contre lequel nous votons, est soumis à un vote consultatif des actionnaires, et n’est approuvé qu’à 55,82% des voix. Nous votons contre 6 résolutions sur les 9 proposées.

En 2022, nous décidons de poursuivre notre campagne. Après la sortie du Document d’Enregistrement Universel (DEU) de Stellantis en février 2022, nous nous étonnons des montants de rémunération attribués à M. Carlos Tavares au titre de l’année 2021. À la suite d’un dialogue avec la société, nous menons une campagne publique et alertons les parties prenantes. Nous posons alors des questions écrites au conseil en amont de l’AG sur la rémunération de M. Carlos Tavares et sur l’organisation de la gouvernance.

Résultats

Même si le groupe a produit des résultats élevés l’année dernière, un tel niveau de rémunération ne semble pas justifié socialement alors que le groupe va probablement devoir procéder à des restructurations massives : la fusion de PSA et FCA a entrainé des surcapacités de production importantes, et on peut s’attendre à ce que de nombreux postes doublons soient supprimés.

La résolution sur le rapport de rémunération des dirigeants a été rejetée à 52% lors de l’Assemblée Générale de Stellantis du 13 avril 2022. Notre campagne publique préalable aux questions écrites a convaincu une majorité des actionnaires. Le vote « Say on Pay » étant consultatif aux Pays Bas, contrairement à la France, le Conseil d’administration de Stellantis a émis un communiqué indiquant qu’il informerait de sa décision lors de l’AG 2023… Il est souhaitable que le Conseil d’administration de Stellantis prenne en compte ce vote négatif et qu’il se mette ainsi à l’écoute de ses actionnaires minoritaires en revoyant la politique de rémunération de ses dirigeants.

En 2022, Phitrust a voté contre vingt-huit « Say on Pay » proposés par les entreprises du CAC40. Nous avons déposé cinq résolutions et questions écrites questionnant la rémunération du premier dirigeant.

En 2021, le chiffre d’affaires de Téléperformance, n°1 mondial de la relation client à distance, a progressé de 25,7% par rapport à l’exercice précédent, à 7,1 milliards d’euros. Quant au résultat, il a bondi de 72% (557 millions d’euros). Chaque année, le groupe qui emploie 420.000 salariés dans le monde affiche des croissances à deux chiffres. 

En 2020, Téléperformance fait son entrée au CAC 40. Sur l’année 2021, le cours a augmenté de 44%. Une valeur recommandée à l’achat par de nombreux analystes. Ce tableau très positif explique sans doute le haut niveau de rémunération de son PDG, qui figure parmi les trois dirigeants les mieux payés du CAC40. Le volet de la répartition de la valeur dans ce groupe est à analyser. L’écart de rémunération avec les salariés (« ratio d’équité ») excède 100 (1 484x selon Proxinvest sur la base du périmètre Groupe, 397x selon la société sur la base du périmètre France). Rappelons qu’en 2021, le «Say-on-Pay » a obtenu un des pires scores de la saison des assemblées générales (59% d’approbation seulement). La question du bien être des salariés est aussi posée dans une société où le taux de rotation est très élevé alors que la main-d’œuvre constitue son principal atout et que le groupe représente souvent une opportunité de premier emploi. Depuis 2021, environ 70% des salariés de l’entreprise sont en télétravail.

Plusieurs questions écrites ont été posées à l’AG sur le sujet du bien-être des salariés de la part de plusieurs investisseurs professionnels.  Nous réitèrerons nos questions en 2023 à la fois sur les conditions de travail des salariés et le niveau de l’ensemble des composantes de la rémunération de son premier dirigeant. Même si le groupe a produit de très bons résultats l’année dernière, ce niveau de rémunération ne nous semble pas justifié socialement avec un ratio d’équité aussi élevé.

La loi dite Florange promulguée le 1er avril 2015 impose dans les sociétés cotées l’attribution de droits de vote double pour toutes les actions détenues au nominatif depuis deux ans par le même actionnaire. La loi vise à contrecarrer le court-termisme de certains actionnaires en renforçant ceux porteurs de stratégies de long terme. 

Des effets pervers

Les droits de vote double sont porteurs d’effets pervers : ils soustraient le dirigeant à la discipline du marché et les actionnaires majoritaires, disposant d’un avantage structurel en termes d’information et de décision sur la gestion de la société, peuvent être tentés de détourner le mécanisme à leur avantage pour capter la valeur due aux actionnaires minoritaires. 

Ces droits de vote multiples sont surtout le fruit de fondateurs qui les ont instaurés avant d’introduire leur société en bourse. La dissociation entre propriété et contrôlé que créent les droits de vote multiples ou les actions sans droit de vote est particulièrement malsaine car elle encourage justement la création de groupe d’investisseurs seulement intéressés par le dividende, sans affectio societatis, qui laissent les pleins pouvoirs à un actionnaire ou à un concert d’une poignée d’actionnaires.

Si nous sommes pour un actionnariat de long terme, nous préférons de loin le principe d’égalité des actionnaires « une action, une voix ». 

On demande beaucoup aux entreprises. Dérèglement climatique, désordres sociétaux… Au-delà de leurs impératifs de performance économique, il s’agit pour elles d’afficher leur volonté de prendre part aux nouveaux défis mondiaux. « La capacité de l’entreprise à transformer le monde arrive à un point de bifurcation, sinon de rupture. L’humanité doit affronter des défis et des déséquilibres considérables – croissance des inégalités, dommages environnementaux, etc. – pour lesquels l’entreprise apparaît simultanément comme une cause et comme un levier indispensable pour y répondre » ( Entreprises, Responsabilités et Civilisations. Vers un nouveau cycle du développement durable Presse des Mines – Kevin Levillain, Blanche Segrestin, Armand Hatchuel, et Stéphane Vernac, novembre 2020 ) 

« Les entreprises sont plus que jamais soumises à des pressions législatives, médiatiques, et de leurs investisseurs pour accélérer l’évolution de leur modèle d’affaires vers une économie compatible avec l’Accord de Paris ». déclare Denis Branche DGD de Phitrust.

Quel meilleur levier que celui de la gouvernance, et donc de l’exercice du pouvoir, pour mettre en œuvre la transition des entreprises ? 

Pour sa campagne d’engagement 2022, la Sicav PAI France alerte et questionne tous les présidents des sociétés du CAC40 sur la gouvernance stratégique de leur société et notamment comment celle-ci se matérialise dans : 

> L’organisation et les compétences du Conseil, 

> Les engagements environnementaux, 

> Les investissements et la politique de distribution, 

> La politique de rémunération,

> L’intégration des parties prenantes dans cette stratégie.

Sur les sujets environnementaux, la Sicav a renforcé les compétences de son comité technique avec la participation de Carbone 4. L’initiative des Science Based Targets reste au centre de notre engagement consolidé par leur nouvel outil, le Net Zero Standard. Ce référentiel permet aux entreprises d’affirmer leurs ambitions climatiques tout en rassurant l’ensemble des parties prenantes sur leurs capacités à mettre en œuvre ces changements grâce à un cadre scientifique.  La présence de longue date de Proxinvest à notre comité technique nourrit nos réflexions sur les sujets de gouvernance et sociaux, notamment sur le partage de la valeur au sein des sociétés ( Rapport 2021 sur les rémunérations des dirigeants ). En cohérence, la politique de vote de la Sicav renforce ses positions sur les résolutions environnementales et sociales pour la saison des assemblées générales 2022.

Alerter sur la responsabilité des entreprises… et des actionnaires 

Nous poursuivons cette année le questionnement des présidents sur l’adoption d’une raison d’être statutaire et la qualité de société à mission. Si le rapport Rocher d’octobre 2021 souligne le caractère « fédérateur pour les salariés, actionnaires et parties prenantes de la société », ce cheminement reste pour les sociétés cotées encore très marginal, particulièrement au sein du CAC 40 ( Danone, seule société à mission – Podcast la Story des Echos, mars 2021 ). Il pose la question de l’alignement des intérêts des actionnaires…et de leurs responsabilités.  

Preuve en est le dernier rapport de Share Action « Voting Matters 2021: Are asset managers using their proxy votes for action on environmental and social issues? ». L’ONG anglaise souligne le manque d’implication des gestionnaires d’actifs lors des votes en assemblées générales sur des résolutions environnementales et sociales. Seule une résolution environnementale sur trois a reçu un soutien majoritaire. « Le secteur n’utilise toujours pas son droit de vote pour encourager les sociétés cotées en Bourse à améliorer leurs performances sociales et environnementales », regrette l’organisation dans son rapport publié le 15 décembre dernier.

Nb : la société Phitrust a adopté la qualité de société à mission en juin 2021.


Cinq résolutions et un dialogue persévérant

Gouvernance
2006 et 2007 : Suppression de la clause statutaire de limitation des droits de vote

Rémunérations
2009 : Suppression de la rémunération variable du Président

Environnement
2011 : Modification des statuts pour obtenir l’information dans le rapport de gestion sur l’exploitation des sables bitumineux.
2016 : Publication d’un rapport annuel sur la stratégie en matière de transition énergétique.
2020 : Dialogue actionnarial aboutissant à la modification de l’article 14 des statuts : la responsabilité des administrateurs est élargie aux enjeux environnementaux et sociaux.

Les questions climatiques sont désormais au cœur des décisions stratégiques des entreprises et donc des assemblées générales. Les investisseurs comme les entreprises ont pris conscience, surtout depuis l’Accord de Paris, que le statu quo n’était plus possible. 

De la loi NRE de 2001 à la loi dite de « Devoir de vigilance » en 2017, en passant par les engagements de transparence du Grenelle de l’environnement, les sociétés cotées doivent désormais identifier les risques d’atteinte à l’environnement ou aux droits de l’homme induits par leurs activités directes et indirectes. Toutefois, ces engagements en faveur du climat ou de l’environnement n’avaient rien d’évident il y a quelques années encore. Nous lançons ainsi en 2011 la première résolution environnementale en France, avec l’appui d’ONG, Greenpeace France et le National Resource Defence Council (États-Unis), qui sortaient ainsi de leur mode d’action habituel. L’idée était déjà et de manière pionnière de permettre une prise de conscience par les actionnaires des enjeux environnementaux. Le projet de résolution porte sur les risques environnementaux de l’exploitation des sables bitumineux au Canada. 

En 2013, le groupe annoncera son retrait de deux projets sur les sables bitumineux. Les résultats nets 2020 seront plombés par les dépréciations d’actifs de 8,5 milliards de dollars – dont 7 milliards de $ portant sur les sables bitumineux au Canada…La sortie totale est annoncée pour 2023.

En 2016, après un dépôt de résolution porté par Phitrust, le Conseil d’administration de Total décide de compléter son rapport de gestion par la description des principaux risques et incertitudes auxquels le Groupe est confronté et en particulier ceux liés au changement climatique. 

L’objectif que nous poursuivons en 2019/2020 : concrétiser ce dialogue en demandant l’inscription dans les statuts d’une modification de l’article 14 en élargissant la responsabilité des administrateurs aux enjeux environnementaux et sociaux. C’est un progrès y compris par rapport à ce que demande la loi Pacte : c’est un enjeu qui est devenu statutaire et une obligation qui s’impose maintenant à l’ensemble du Conseil. Sa bonne application sera de la responsabilité des administrateurs, ce qui en droit français, implique un devoir important. 

La résolution est votée à plus de 98% des voix. 

En 2021, Total propose une résolution climatique, « say on climate ». C’est un énorme chemin parcouru par le groupe depuis ces dernières années et nous avons voté cette résolution, comme l’écrasante majorité des investisseurs du Climate Action 100 +. 

Certes, nous pouvons toujours demander plus car la transition énergétique ne va jamais aussi vite que nous le souhaitons. Mais nous considérons que la direction et le Conseil du groupe sont désormais publiquement conscients des enjeux. 

La saison des Assemblées Générales 2021 a été marquée par l’activité d’actionnaires de plus en plus engagés. Dans un contexte où les formats « distanciels » s’imposent, parfois au détriment de la démocratie actionnariale, cette activité aura permis d’obtenir des avancées significatives.

Le Say-on-Climate, fils de l’engagement actionnarial

Le vote de plusieurs résolutions dites Say-on-Climate est un véritable pas en avant dans la transition écologique des grandes entreprises. Néanmoins, si plusieurs résolutions de ce type ont pu être votées lors de cette saison des AG (Atos, Vinci, TotalEnergies…), il est important de noter qu’elles sont en partie le fruit d’un engagement actionnarial de long terme. Cette année, TotalEnergies a proposé une résolution climatique. C’est un énorme chemin parcouru par le groupe depuis ces dernières années et nous avons voté cette résolution, comme une très forte majorité des investisseurs du Climat Action 100 +, puisqu’elle a obtenu 82% des voix (abstention incluse). Dans ce cadre, la mise en place du Say-on-Climate est un pas de plus dans le long chemin du dialogue mené par Phitrust avec l’entreprise depuis 1999, qui déjà l’année dernière avait conduit TotalEnergies à inscrire la responsabilité environnementale et sociale dans les missions du Conseil d’administration

Enfin, et pour être complet, il faut dire que l’engagement actionnarial devra aussi faire porter ses efforts sur les résultats de ces résolutions. En effet, il conviendra d’évaluer le degré de contrainte qu’elles imposent aux entreprises. De même, une mise à jour régulière devra être réalisée pour rester en phase avec les objectifs et l’avancement du changement climatique.

Partage de la valeur : rémunérations et dividendes au microscope

Un autre sujet récurrent des AG cette année aura été celui du partage de la valeur. Ainsi, les résolutions relatives à la rémunération des dirigeants auront été particulièrement contestées. L’année 2020 avait vu plusieurs annonces de dirigeants souhaitant faire don d’une partie de leur rémunération. 2021 aura vu les actionnaires extrêmement offensifs sur ce sujet. Les rémunérations des premiers dirigeants de Carrefour, Téléperformance, Thales, TotalEnergies, STMicroelectronics, Veolia et Worldline, ont été votées avec des taux de contestations élevés (>40%). 

La question des dividendes aura également été au centre de plusieurs AG. Phitrust a marqué son  opposition au « rattrapage » effectué en compensation de la baisse des dividendes versés en 2020, estimant que le besoin d’investir dans la transition environnementale est prioritaire et pouvait justifier de ne pas accroître en 2021 la rémunération des actionnaires (Arcelor Mittal, Atos, Carrefour, Engie, TotalEnergies…). 

Gouvernance 

Nous avons toujours milité pour une gouvernance solide et représentative des parties prenantes de l’entreprise, équilibrée, comme garante de la mise en œuvre de la nécessaire transition des modèles d’affaires des entreprises. Le cas de Danone a mis en lumière une crise de gouvernance. C’est pourquoi, dans un souci d’unité, nous avons déposé avec d’autres investisseurs professionnels (Mirova, Ircantec, OFI AM, CAVP)  un point à l’ordre du jour demandant aux administrateurs de préciser en assemblée générale leur vision de Danone et ce qu’ils pouvaient apporter au CA. Nous resterons vigilants sur ces sujets de gouvernance qui sont essentiels car d’eux dépendent la bonne mise en place de la stratégie et la réalisation des objectifs en matière environnementale et sociale. L’exemple d’EssilorLuxottica, d’une soi-disant fusion entre égaux, est à ce titre marquant, avec aujourd’hui une gouvernance qui entérine la mainmise, que nous avions prévue dès l’annonce de l’opération, d’un actionnaire italien sur l’ensemble du groupe constitué.


Pour cela, nous avons et comptons encore renforcer notre capacité d’action. Carbone4 rejoint le Comité Technique de notre Sicav d’engagement sur les sujets environnementaux. De nouveaux investisseurs sont venus nous rejoindre. C’est bien, mais encore insuffisant pour constituer un pôle d’engagement actionnarial indépendant en France. La frontière entre la nécessité d’encourager et d’accompagner les entreprises dans leur transition et le vote sanction est un exemple. Beaucoup de gérants vont choisir d’exclure de leurs portefeuilles nombre de sociétés, notamment énergétiques, pour éviter de rédiger des rapports de conformité, d’expliquer aux clients leurs choix… Ce désengagement pourrait alors profiter à des investisseurs non européens, moins scrupuleux sur les questions climatiques…. 

Juillet 2020 – Novethic publie sa première étude sur l’engagement actionnarial, une pratique d’investissement responsable encore peu répandue en France. Elle consiste pour les actionnaires à utiliser divers moyens de pression sur les entreprises pour que celles-ci identifient et gèrent mieux leurs risques Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG). L’étude de Novethic permet de comprendre ces nouveaux rapports de force à travers une présentation synthétique des forces en présence (actionnaires de référence, géants de la gestion d’actifs…), les études de cas de trois assemblées générales (AG) de 2020 emblématiques – Total, H&M et Engie –, et une analyse des stratégies des grands investisseurs.

Avec les témoignages de Denis Branche et Olivier de Guerre sur l’action d’engagement menée par Phitrust depuis plus de 15 ans !

Retrouvez l’étude de Novethic !

Lundi 6 Avril 2020

La SICAV Phitrust Active Investors France propose aux sociétés du CAC40 d’amender la résolution sur le versement des dividendes en proposant d’en consacrer une partie à la constitution d’un fonds dont l’objectif serait de soutenir les parties prenantes de leur écosystème.

Le 18 mars dernier, Phitrust a pris position en demandant que soit décalée de quelques mois la tenue des Assemblées Générales, et par conséquent le versement des dividendes avec pour objectif de laisser du temps pour redéfinir les priorités et les objectifs des entreprises post-confinement   Cette mesure entraînerait de facto un report voire une diminution des dividendes payables au titre de 2019. Cette initiative a été largement reprise et commentée par plusieurs acteurs, que ce soit les entreprises elles-mêmes, des institutions de place ou des syndicats.

Dans le prolongement de cette initiative, et afin d’alimenter les débats des conseils pendant ce délai supplémentaire qui leur a été donné pour tenir leurs AG, Phitrust  a adressé le 1er avril dernier une lettre à 28 (1) dirigeants du CAC40 leur proposant, lors de l’Assemblée Générale à venir, d’amender la résolution prévoyant le versement du dividende en envisageant d’en consacrer une partie à la constitution d’un fonds ayant pour objectif le soutien des parties prenantes (dont leurs sous-traitants) de leur écosystème.

Un mécanisme similaire a été mis en place par Danone, après un vote de son Assemblée Générale de 2009 : le fonds Danone Ecosystem.

Ce fonds, dont la création serait votée par les assemblées générales de 2020, permettrait aux entreprises, et à leurs actionnaires, de participer de manière active au soutien de l’économie tout en atténuant les effets de la crise actuelle et en favorisant de manière indirecte la reprise de l’activité de ces groupes.

Nous publierons dans un communiqué ultérieur les réponses qui nous ont été données par les conseils d’administration du CAC40 à cette proposition.

Téléchargez le Communiqué de Presse


A propos de la Sicav Phitrust Active Investors France

La Sicav Phitrust Active Investors intervient depuis 2003 auprès des entreprises cotées du CAC40 pour qu’elles fassent évoluer leurs pratiques environnementales, sociales et de gouvernance.


(1) Air Liquide, Atos, Axa, Bouygues, Capgemini, Carrefour, Dassault Systèmes, Engie, EssilorLuxottica, Hermès International, Kering, Legrand, L’Oréal, Lvmh, Michelin, Orange, Pernod Ricard, Publicis, Safran, Saint-Gobain, Sanofi, Schneider Electric, Thales, Total, Veolia, Vinci, Vivendi, Worldline.

Dépôts des résolutions

2011 : Publication dans le rapport de gestion de Renault de l’information sur les rémunérations des mandataires sociaux pour toute société consolidée (Nissan)

2013 : Modification de la structure de gouvernance de la société en Conseil de Surveillance et Directoire

2014 : Modification de la structure de gouvernance de la société en Conseil de Surveillance et Directoire

2019 : Fin par anticipation du mandat d’administrateur du président du comité des rémunérations.

Depuis 2006, Phitrust alerte les Conseils d’administration, les actionnaires et les médias sur les questions de transparence des rémunérations et de concentration des pouvoirs au sein du Groupe Renault Nissan. Les actionnaires ont préféré ne voir que la dynamique industrielle, la vision de son dirigeant et le cours de Bourse. Le 19 novembre 2018, Carlos Ghosn est appréhendé par les autorités Japonaises qui lui reprochent une dissimulation de revenus et des abus de confiance, entraînant le groupe dans une grave crise de gouvernance à un moment critique pour l’industrie automobile. 

Le contexte : Nous nous intéressons depuis longtemps à la transparence des rémunérations au sein du Groupe Renault Nissan. Dans une lettre adressée en 2006 à l’ancien Président du Conseil d’administration de Renault, Louis Schweitzer, nous remettons en question sa rémunération et le respect des conventions réglementées dans le cadre de la « Loi Breton ». A la suite de la crise financière de 2008, nous exprimons notre crainte concernant le projet de regrouper les fonctions de direction, finalement adopté en 2009. Une concentration de pouvoirs sans précédent puisque que Carlos Ghosn était déjà PDG de Nissan et DG de Renault. L’année suivante, nous réclamons que la totalité des rémunérations versées par l’Alliance Renault Nissan à Carlos Ghosn soit clairement indiquée par le document de référence. 

Les résolutions : En raison de l’inaction de Renault, nous décidons de déposer en 2011 une résolution extraordinaire sur la transparence des rémunérations de Carlos Ghosn, en particulier son salaire chez Nissan. Puisque Renault consolide ses comptes avec Nissan, il était en effet curieux que Renault n’ait pas communiqué la rémunération de M. Ghosn chez Nissan, conformément au code de commerce. Ces graves et répétés manquements aux devoirs d’information des actionnaires sont révélateurs de faiblesses de gouvernance. 

Les résultats : Nous comprenons rapidement que ces préoccupations concernant la rémunération provenaient de la non-séparation des fonctions de direction, qui aurait dû être mise en place dès 2009. C’est pourquoi, à la suite d’initiatives répétées lors de dialogues, nous soumettons à Renault des projets de résolution en amont des AG de 2013 et de 2014 concernant la séparation des fonctions de direction de Carlos Ghosn, qui s’imposait compte tenu du développement international de Renault et des nombreux et complexes sujets à traiter par les dirigeants. A la suite de l’entrée en vigueur de la loi Sapin II sur le «Say on Pay», nous votons contre la résolution concernant la rémunération de M. Ghosn. L’appui de l’Etat Français, représentant 20% du capital, permet le rejet de la résolution, qui n’obtient que 45,88% des votes des actionnaires. Lors de l’AG de 2017, cette même résolution ne sera approuvée qu’à 53,05%, malgré le vote contre de l’Etat Français. Ces objections au salaire ont été nourries par le manque continu de transparence concernant le salaire de M. Ghosn, une préoccupation des actionnaires largement ignorée par Renault. 

Dépôts de résolutions

2018 : Modification de la limite d’âge dans les statuts de 95 à 75 ans pour le DG en vue d’obtenir la séparation des postes de Président du CA et de DG.

2019 : Nomination de Wendy Evrard Lane comme administrateur indépendant & nomination de Jesper Brandgaard comme administrateur indépendant

Depuis l’annonce en janvier 2017 du rapprochement « entre égaux » entre le fabricant de verres ophtalmiques Essilor International et le lunettier Luxottica, nous avons prévenu les dirigeants et les actionnaires que cette opération relevait d’une prise de contrôle rampante du groupe français par le holding familial de contrôle de Luxottica sans prime pour les minoritaires et sans clarté, ni équilibre sur la future gouvernance. Des alertes qui n’ont pas été entendues et qui se sont révélées justifiées.

Le contexte  

Ce qui s’annonçait comme une fusion « exemplaire » pour créer un leader mondial a vite connu des ratés dans la mise en place de la future gouvernance. Nous avons multiplié les contacts avec les dirigeants et les courriers en amont des assemblées générales de 2017 et d’avril 2018 pour obtenir davantage de clarté sur la gouvernance.  Au départ, le processus de mise en place d’une nouvelle gouvernance devait s’étaler sur deux ou trois ans. Mais l’intention affichée par le fondateur de Luxottica et détenteur de 31% des droits de vote du nouveau groupe, de nommer un de ses proches à la direction générale a brisé un fragile équilibre. En quelques mois, la gouvernance s’est retrouvée prise au cœur d’un conflit ouvert au sein de la direction du groupe, provoquant la chute du titre.

Les résolutions 

C’est dans un climat déjà tendu que nous avons présenté une résolution lors de la première assemblée générale de la nouvelle entité, EssilorLuxottica, en novembre 2018. Cette résolution visait à abaisser la limite d’âge du directeur général de 95 ans à 75 ans afin d’obtenir la séparation des fonctions de direction, trop concentrées dans les mains du PDG, Leonardo Del Vecchio, 83 ans, et d’éviter de futurs blocages. Si la résolution n’a pas réuni le seuil de capital nécessaire à son inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée générale, elle a cependant contraint le PDG d’EssilorLuxottica à préciser son intention de recruter un directeur général extérieur au groupe avant 2020. Lorsque le PDG a finalement attaqué le vice-président devant la chambre de commerce international (CCI) pour violation des accords de rapprochement, Phitrust et d’autres sociétés d’investissement ont proposé, en mai 2019, la nomination de deux administrateurs indépendants pour apporter des éléments modérateurs au sein du conseil d’administration. 

Les résultats 

Les scores obtenus sur les deux résolutions proposant des administrateurs indépendants ont été des signaux positifs, malgré la volte-face des actionnaires salariés et retraités d’Essilor. Ces projets de résolution ont contribué à mettre fin au conflit ouvert, notamment la fin de la procédure d’arbitrage devant la CCI et la nomination au conseil du directeur général d’Essilor. Cette affaire montre à nouveau les limites des fusions « entre égaux », sans lancement d’offre publique.  En outre, le rapprochement de sociétés sans actionnaire de référence (Essilor) avec une société ayant un actionnaire de référence familial (Luxottica) pose de fait un problème de contrôle. La solution passe notamment par la nomination d’administrateurs indépendants, pour éviter de nouveaux conflits ouverts.  Notre expérience en France montre que 100% des fusions entre égaux ont échoué… pour des questions de pouvoirs. 

Dépôts de résolutions par Phitrust

2005 : Suppression de la clause statutaire de limitation des droits de vote


2015 : Maintien du droit de vote simple (sociétés ayant des droits de vote simple avant la loi Florange)

2019 : Résolution demandant la fin par anticipation du mandat de Yannick Bolloré en tant que membre du Conseil de Surveillance. Gouvernance inversée : il est PDG de la filiale opérationnelle Havas et Président du Conseil de Surveillance.

Le cas Vivendi

En matière de mis en cause d’une gouvernance, Vivendi apparaît comme un cas d’école : mélange des genres, déséquilibre des pouvoirs, droits de vote double. Et rarement investisseurs engagés et agences de conseil de vote n’auront été si vent debout contre des résolutions présentées par le groupe depuis que Bolloré est significativement monté au capital en 2015. Depuis, le groupe est passé sous le contrôle de fait de la famille Bolloré alors même que la stratégie manque de clarté dans sa mise en œuvre. À l’issue de l’assemblée générale 2018,  Yannick Bolloré a succédé à son père Vincent Bolloré à la tête du conseil de surveillance, malgré ses fonctions de PDG de la filiale Havas.

Le contexte

Les pratiques de gouvernance de Vivendi sont régulièrement pointées du doigt. Il était régulièrement reproché à Vincent Bolloré d’assumer des fonctions de direction exécutives dans des filiales, voire d’assurer la direction effective du groupe, alors même qu’il se trouvait à la présidence du conseil de surveillance. Le manque d’indépendance du conseil, les rémunérations  et, surtout, le maintien de droits de vote double ont été également régulièrement dénoncés comme un contrôle de fait par un actionnaires minoritaire, par des investisseurs, comme Phitrust, et des agences de conseil de vote.  Aujourd’hui, c’est la nomination, en urgence en 2018, de Yannick Bolloré au poste de président du conseil de surveillance qui pose question. Ce mélange des genres en termes de gouvernance reste une source de préoccupation à l’heure où le groupe rencontre des enjeux stratégiques majeurs pour son avenir.

Les résolutions

Dans le sillage de la loi Florange qui a sanctuarisé le droit de vote double, Phitrust, inquiet d’une éventuelle prise de contrôle de Vivendi par Bolloré sans payer de prime aux actionnaires, a proposé une résolution « une action, une voix » pour l’assemblée générale extraordinaire de 2015. La résolution a rassemblée plus de la moitié des voix, sans toutefois atteindre les deux tiers nécessaires. En 2017, Phitrust et les agences de conseil de vote se sont opposés à la majorité des résolutions, alors même que le Haut comité du gouvernement d’entreprise, en charge de veiller au respect du code Afep-Medef, a critiqué la gouvernance du groupe. En 2019, Phitrust monte à nouveau au créneau avec un projet de résolution demandant la révocation du mandat conseil de surveillance de Yannick Bolloré, par ailleurs PDG de filiales, pour rétablir l’équilibre des pouvoirs au sein de Vivendi. Une résolution qui n’a pas été inscrite faute d’atteindre le seuil légal de 0,5% du capital. Parallèlement, des questions écrites ont été adressées sur le projet d’Opra sur 25 % du capital de Vivendi qui permettrait au groupe Bolloré de franchir le seuil des 30 % sans lancer d’offre publique.

Résultats

Malgré tous ces efforts, les chances de faire évoluer la gouvernance de Vivendi sont faibles, le groupe étant contrôlé de fait par la famille Bolloré. La position des actionnaires minoritaires ne peut être alors qu’une position de principe, toutes les initiatives non agrées par les dirigeants étant exclues,  dans l’attente de résultats positifs apportés sur la gouvernance. Ces manquements aux principes de base de la gouvernance finiront par attirer l’attention d’un nombre croissant d’investisseurs intentionnels, de plus en plus engagés par des critères d’investissement  socialement responsable. Le respect d’une gouvernance duale n’est pas une remise en question de l’actionnariat familial mais bien la recherche d’un équilibre des pouvoirs pour la bonne conduite des affaires.

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